Tournée résolument vers l’international depuis plus de cinquante ans, la coutellerie Jean Dubost a su s’adapter à des marchés exigeants, sans perdre son identité et son histoire, bien au contraire. Alexandre Dubost, 4ème génération de couteliers, nous détaille sa façon de voir son métier, résolument tourné vers l’avenir.
À 46 ans, Alexandre Dubost porte fièrement le nom de son arrière-grand-père, fondateur de la coutellerie Jean Dubost en 1920. En plus du patronyme, il a aussi hérité d’une passion commune pour ce métier : « J’ai toujours connu la manufacture, située en face de la maison familiale » se souvient-il.
La famille a toujours été très impliquée dans le développement de la société : « Même mon arrière-grand-mère participait à toutes les étapes de la fabrication, du rivetage à l’essuyage des couteaux ». Aujourd’hui encore, il n’est pas rare de retrouver Alexandre à l’atelier, au milieu des salariés.
Une entreprise toujours en mouvement
Solidement implantée dans le bassin thiernois, la coutellerie Jean Dubost a très tôt pris le parti de se développer sur le marché international. « Au début des années 1960, mon grand-père Jean Dubost est allé chercher de nouveaux partenaires dans les grandes foires aux Etats-Unis », explique Alexandre Dubost, qui a intégré ce côté pionnier à l’ADN de l’entreprise. « Une entreprise doit toujours être en mouvement dans ses processus de production et de fabrication, ainsi que dans son développement. »
Un savoir-faire traditionnel et industriel
En se plaçant sur le marché du haut de gamme nord-américain, la société a dû s’adapter aux exigences de ce marché : « Ce que nous proposons, c’est l’association d’un savoir-faire industriel et d’un savoir-faire traditionnel. Ainsi, nous utilisons des machines à commande numérique pour l’aiguisage, et le manche en bois est monté et ajusté à la main, par des personnes formées, dans la plus pure tradition de la coutellerie française ». Aujourd’hui, la société produit 30 000 pièces par jour et exporte dans 55 pays.
Mieux que le « Made in France », le « Made in Thiers »
Pour la clientèle internationale « la principale attente, c’est d’acheter du « Made in France ». Elle est en quête d’un savoir-faire et d’un design français. Ainsi, le fait que nos couteaux soient d’authentiques Laguiole représente une véritable valeur ajoutée pour eux ».
Les investissements consentis par Alexandre Dubost sont payés en retour quand il voit l’enthousiasme de ses clients en visite à la manufacture, et qui découvrent que tous ces couteaux et couverts de table sont entièrement réalisés sur place.
Le développement durable, un intérêt stratégique
Cet intérêt pour la production locale va même très loin, puisque « la majorité de notre parc de machines a été fabriqué par des entreprises locales, situées dans la région, et selon notre cahier des charges » détaille Alexandre Dubost.
C’est dans le prolongement de cette idée, associée à une logique de développement durable, que la société a développé des manches de couteaux issus d’un processus de fabrication utilisant l’amidon de maïs, recyclables et même biodégradables. « Nous sommes aussi la seule coutellerie certifiée PEFC [NDLR : Certificat en faveur d’une gestion durable des forêts] pour nos manches en chêne. Il en va de même pour les cartons qui sont recyclés localement, et même nos chiffons, utilisés pour le dernier contrôle qualité avant emballage, qui sont recyclés par une entreprise locale » .
C’est aussi un enjeu de ressources humaines : « Il faut intéresser les jeunes, savoir les accueillir. Nous souhaitons qu’ils se sentent bien chez nous ».
Être au fait des tendances
Dans les arts de la table, les tendances sont en continuelle évolution. Une réalité qu’Alexandre Dubost a parfaitement intégrée, en collaborant de façon régulière avec le designer Jérôme Pouey : « Nous partageons la même sensibilité. Il a une vraie facilité à créer des objets qui sont à la fois beaux et utiles ». Une collaboration prolifique puisque ce sont jusqu’à six collections qui sortent chaque année de la manufacture Jean Dubost pour les arts de la table.
Des baguettes à la française
Récemment, ils ont développé une gamme de baguettes chinoises à la demande d’Alexandre Dubost : « C’est parti d’un partenaire coréen. L’idée nous est venu de créer une baguette à la française ».
Au-delà du jeu de mots et du coup de communication, l’entrepreneur a tout de suite compris l’intérêt qu’il pouvait tirer de ce produit : « En Corée, les produits français sont très populaires. La culture asiatique est mondialement connue et aujourd’hui, nous commercialisons les baguettes en France et en Chine ! » Il a fallu s’adapter à ce marché, avec une attention toute particulière au packaging : « Les Coréens ont une exigence de qualité très forte. Ils sont très sensibles aux détails ».
Pour un melting-pot culinaire
Alexandre Dubost suit de très près les nouveaux modes de convivialité de la table : « Les codes changent et évoluent vers l’ouverture, à l’instar des cuisines. Avant, c’était une pièce fermée et confinée. C’est désormais un lieu d’échanges, ouvert sur le salon. Il en va de même sur la façon dont les gens passent à table. Aujourd’hui, c’est la convivialité qui prime. On peut tout à fait recevoir des invités sur une thématique espagnole, avec une bouteille de vin australien ».
Et la France dans tout cela ? « Avec la bistronomie (grande cuisine servie en petite quantité comme dans un bistrot), notre pays a su préserver sa belle image et la nouvelle cuisine s’inscrit parfaitement dans cette tendance, celle d’un melting-pot culinaire ».